Quelle étrange expérience que cette mise en scène du Bourgeois gentilhomme par Lazar! lui et ses Enfants de Molière nous convient à un retour dans le passé de notre langue, de nos arts et de notre culture. Son projet consiste à être au plus prêt historiquement des spectacles montés par Molière et Lully, tant par la diction, les costumes, les décors et bien sûr les ballets!
Le français tel qu'il est prononcé sonne étrangement à nos oreilles car si nous savons que notre langue a une histoire, faisant entrer dans l'usage certains mots ou expressions et en faisant tomber d'autres en désuétude, nous oublions qu'il en va de même pour la prononciation. Ce français paraît affecté, un peu outrancier mais il rend merveilleusement à la fois les registres de langues correspondant aux différentes classes sociales des personnages mais aussi les origines régionales.
La scène n'est éclairé qu'à la bougie, redonnant vie aux fameux de la rampe. Le décor est unique et indique un intérieur bourgeois. Il m'a rappelé (simple coïncidence ou référence consciente?) le décor de la mise en scène d'Atys de Lully par Villégier en 1987 : une salle au murs lamés d'or sombre, aux multiples entrées. Les costumes sont bariolés ou très simples en fonction du caractère des personnages et des moment du drame (la grande turquerie étant bien évidemment chamarrée).
Quant à la musique et à la danse... Car on a tendance, trace des classes de lettres modernes, à envisager les pièces de Molière uniquement comme des chef-d'œuvre pour le théâtre. Mais le théâtre est avant tout une scène sur laquelle tout peut se produire. Molière dans cette mise en scène sort du Lagarde et Michard pour redevenir l'homme des tréteaux et des baladins. On oublie trop souvent que les deux tiers de ses pièces sont des comédies-ballet car combien sont encore montées intégralement et fidèlement de nos jours ? Or l'intrication du théâtre, de la danse et de la musique n'a jamais été aussi forte que dans ce Bourgeois gentilhomme! Molière y manifeste même un réflexion extrêmement riche sur le genre du ballet, sur la spécificité des arts, leurs pouvoirs et leurs limitent.
Je recommande très fortement de lire le chapitre V de l'essai de Mark Franko, La danse comme texte, Idéologies du corps baroque (pp.143-174) publié chez L'éclat en 2005 (contre-rendu de lecture ici). Il analyse de ce point-de-vue l'évolution du rapport entre drame et ballet chez Molière et montre que ses créations mettent en scène les limitent mêmes du genre appelant un renouvellement formel qui ce fera sans lui, puisque ce seront Lully et Quinault qui proposeront la tragédie lyrique. Pour les néophytes ou les pressés, je recommande la lecture lumineuse des quelques pages (pp.403-407) de l'Histoire de la musique occidentale sous la direction de Jean et Brigitte Massin chez Fayard.
La musique réserve des petits joyaux ("je languis nuit et jour", le premier air composé devant nous par l'élève musicien et le dialogue en musique du premier acte dans le gout de la pastorale) et Dumestre au pupitre sait donner vie ou suavité à son orchestre.
Les danses quant à elles sont gracieuses et il faut être attentif aux mouvements de mains, très travaillés.
On peut regretter des longueurs (par exemple la scène de Mamamouchi), un manque de mordant et une captation vidéo qui privilégie les gros plans aux scènes d'ensemble, mais l'ensemble a le mérite d'exister et prend un risque par son souci de fidélité, comme si le théâtre vivait lui aussi à l'heure des baroqueux d'antan!
Je préfère de loin, cette version à celle d'Hugo Reyne et de sa Symphonie du Marais, enregistrée en public mais pas filmée, car cette dernière redistribue complètement tous les numéros : les ballets des nations ouvrent la pièce et la turquerie la clôt! Elle est peut-être plus drôle pour un auditeur non averti mais elle est reconstruite pour obtenir le maximum d'effet en éviter que le spectateur décroche.
Le français tel qu'il est prononcé sonne étrangement à nos oreilles car si nous savons que notre langue a une histoire, faisant entrer dans l'usage certains mots ou expressions et en faisant tomber d'autres en désuétude, nous oublions qu'il en va de même pour la prononciation. Ce français paraît affecté, un peu outrancier mais il rend merveilleusement à la fois les registres de langues correspondant aux différentes classes sociales des personnages mais aussi les origines régionales.
La scène n'est éclairé qu'à la bougie, redonnant vie aux fameux de la rampe. Le décor est unique et indique un intérieur bourgeois. Il m'a rappelé (simple coïncidence ou référence consciente?) le décor de la mise en scène d'Atys de Lully par Villégier en 1987 : une salle au murs lamés d'or sombre, aux multiples entrées. Les costumes sont bariolés ou très simples en fonction du caractère des personnages et des moment du drame (la grande turquerie étant bien évidemment chamarrée).
Quant à la musique et à la danse... Car on a tendance, trace des classes de lettres modernes, à envisager les pièces de Molière uniquement comme des chef-d'œuvre pour le théâtre. Mais le théâtre est avant tout une scène sur laquelle tout peut se produire. Molière dans cette mise en scène sort du Lagarde et Michard pour redevenir l'homme des tréteaux et des baladins. On oublie trop souvent que les deux tiers de ses pièces sont des comédies-ballet car combien sont encore montées intégralement et fidèlement de nos jours ? Or l'intrication du théâtre, de la danse et de la musique n'a jamais été aussi forte que dans ce Bourgeois gentilhomme! Molière y manifeste même un réflexion extrêmement riche sur le genre du ballet, sur la spécificité des arts, leurs pouvoirs et leurs limitent.
Je recommande très fortement de lire le chapitre V de l'essai de Mark Franko, La danse comme texte, Idéologies du corps baroque (pp.143-174) publié chez L'éclat en 2005 (contre-rendu de lecture ici). Il analyse de ce point-de-vue l'évolution du rapport entre drame et ballet chez Molière et montre que ses créations mettent en scène les limitent mêmes du genre appelant un renouvellement formel qui ce fera sans lui, puisque ce seront Lully et Quinault qui proposeront la tragédie lyrique. Pour les néophytes ou les pressés, je recommande la lecture lumineuse des quelques pages (pp.403-407) de l'Histoire de la musique occidentale sous la direction de Jean et Brigitte Massin chez Fayard.
La musique réserve des petits joyaux ("je languis nuit et jour", le premier air composé devant nous par l'élève musicien et le dialogue en musique du premier acte dans le gout de la pastorale) et Dumestre au pupitre sait donner vie ou suavité à son orchestre.
Les danses quant à elles sont gracieuses et il faut être attentif aux mouvements de mains, très travaillés.
On peut regretter des longueurs (par exemple la scène de Mamamouchi), un manque de mordant et une captation vidéo qui privilégie les gros plans aux scènes d'ensemble, mais l'ensemble a le mérite d'exister et prend un risque par son souci de fidélité, comme si le théâtre vivait lui aussi à l'heure des baroqueux d'antan!
Je préfère de loin, cette version à celle d'Hugo Reyne et de sa Symphonie du Marais, enregistrée en public mais pas filmée, car cette dernière redistribue complètement tous les numéros : les ballets des nations ouvrent la pièce et la turquerie la clôt! Elle est peut-être plus drôle pour un auditeur non averti mais elle est reconstruite pour obtenir le maximum d'effet en éviter que le spectateur décroche.