mercredi 3 avril 2013

Monteverdi, Le retour d'Ulysse dans sa patrie, Saint-Denis

Comme je rédige ce billet bien après la représentation, je ne vais évoquer que des souvenirs, mais, après tout, n'est-ce pas tout ce qui reste d'un spectacle une fois qu'il s'est achevé et que l'illusion théâtrale a pris fin ? Nous voilà donc partis pour un Monteverdi au Théâtre Gérard Philippe de Saint-Denis. L'arrivée en RER et la partie de la ville traversée ne préparent pas à l'écoute d'un opéra, différence flagrante avec les grandes maisons parisiennes (Les opéras de Paris, Le Comique, Le Théâtre des Champs-Élysées etc.) où on a l'impression d'être déjà dans un décor de spectacle en traversant la ville, en arrivant sur place et en regardant les autres spectateurs. Étonnant théâtre que le théâtre Gérard Philippe, dont l'intérieur tout en bois brut le rapproche un peu du hangar ou de la salle de répétition, ou bien encore de La Cartoucherie. Salle comble en tout cas.
Ce Retour d'Ulysse dans sa Patrie est le seul des trois opéras de Monteverdi que je n'avais jamais eu l'occasion d'écouter ni de voir. On y perçoit clairement l'influence vénitienne par l'importance des rôles secondaires incarnant des personnages populaires et parfois comiques. Alors que l'intrigue de l'Orfeo est très recentrée sur les quelques personnages du drame, l'Ulysse introduit les personnages comiques. Le couronnement de Poppée constituera de ce point de vue, une sorte d'équilibre parfait, et reste, musicalement, mon préféré. 
L'interprétation proposée par Jérome Correas et ses Paladins était très belle, très équilibrée entre les mouvements lents de lamento et les moments triviaux ou champêtres. Malgré les limites inhérentes à un orchestre baroque, l'effectif aurait pu être un petit peu gonflé, vu l’acoustique de la salle car le son s'y perdait un peu et il fallait parfois tendre l'oreille. La distribution vocale était excellente tant par le chant que par le jeu, indispensable dans un tel opéra. Mention spéciale pour le duo central : la Pénélope de Blandine Folio Peres et l'Uysse de Jérôme Billy.
L'article de la Terrasse ci-dessous avait peut-être suscité chez moi des attentes côté mise en scène. Je m'attendais à ce qu'elle soit plus marquée, plus originale, plus symbolique en exploitant la veine du kitsch sacrée méditerranéen. Mais Christophe Rauck est resté mesuré dans ses propositions, avec quelques bonnes trouvailles comme le ballon-lune de Télémaque, les rideaux-paysages ou les scènes de ballets, mais aussi avec quelques faiblesses comme la scène des prétendants. Cependant ses proposition ne noyaient jamais les yeux sous un déluge d'images empêchant de se concentrer sur l'essentiel : la musique et le chant. En tant que spectateur, il m'est malheureusement arrivé de me demander quel était le rapport entre ce que je voyais sur scène et l'intrigue de l'opéra, perdant ainsi le fil de la musique. Christophe Rauck fait preuve d'une humilité bienvenue.
Un beau spectacle donc.